Sécurité auto : la fin des écrans tactiles dans les véhicules ?

Écrit par La rédaction le 14 mai 2024
Sécurité auto : la fin des écrans tactiles dans les véhicules ?

Le tout-tactile dans les voitures, c’est terminé !

D’ici 2026, Euro NCAP devrait actualiser les conditions de certification des véhicules, notamment pour favoriser l’usage de commandes physiques au sein de l’habitacle. Conséquence ? Les constructeurs pourraient être contraints de dire adieu au tout-tactile s’ils veulent obtenir la note maximale de sécurité lors de l’homologation de leurs nouveaux modèles. Décryptage.

 

Vision 2030 : la chasse aux distractions au volant

Euro NCAP (European New Car Assessment Program), en charge du programme d’évaluation des nouveaux véhicules, met en place sa nouvelle feuille de route pour les années à venir : Vision 2030. Dans l’optique de garantir une mobilité plus sûre à l’avenir, l’organisme dresse les nouvelles priorités à atteindre par l’industrie automobile européenne en matière de sécurité. Le programme de certification des véhicules devrait ainsi inclure de nouveaux tests, relatifs notamment à la distraction cognitive des conducteurs.

Depuis quelques semaines, cette volonté fait directement écho aux déclarations de Matthew Avery dans le média numérique Arts Technica. Le directeur du développement stratégique d’Euro NCAP affirme en effet que « la sur-utilisation des écrans tactiles est un problème à l’échelle de l’industrie, presque tous les constructeurs automobiles déplaçant les commandes clés sur des écrans tactiles centraux, ce qui oblige les conducteurs à quitter la route des yeux et augmente le risque d’accidents liés à la distraction » (1).

 

La volonté de revenir aux boutons physiques

Dans cette même interview, publiée début mars, Matthew Avery souligne ainsi que les futurs crash tests tiendront compte du degré de distraction des automobilistes au volant. Dès 2026, les critères d’évaluation « encourageront les constructeurs à utiliser des commandes physiques séparées pour les fonctions de base » (1). L’objectif ? Limiter le temps que le conducteur passe à regarder autre chose que la route et ainsi favoriser une conduite plus sûre.

Toutefois, Euro NCAP recommande une interface physique uniquement pour les fonctionnalités basiques. En effet, l’organisme souhaite que d’ici 2026 les constructeurs reviennent aux commandes physiques pour les clignotants, les feux de détresse, les essuie-glaces ou encore le klaxon. Cela vaut également pour la fonction eCall, le système d’appel d’urgence obligatoire sur tous les nouveaux modèles homologués depuis 2018 au sein de l’Union européenne.

 

Le tout-tactile : un handicap en matière de sécurité

Depuis plusieurs années, les commandes digitales se sont démocratisées au sein des habitacles. Certains modèles les plus récents ont d’ailleurs totalement abandonné les boutons physiques, à l’image du MG Marvel R par exemple. Or, les fonctionnalités tactiles présentent un inconvénient de poids en matière de sécurité : elles obligent l’automobiliste à quitter la route des yeux pour sélectionner une fonctionnalité. Cette conception peut ainsi nuire à la concentration du conducteur, tout particulièrement s’il faut passer par des menus pour choisir la fonction désirée.

Si le temps consacré à l’utilisation de commandes tactiles reste limité, il peut malgré tout être à l’origine d’un accident : il suffit en effet de quelques secondes d’inattention pour perdre le contrôle du véhicule, a fortiori à grande vitesse. A contrario, les commandes manuelles peuvent être actionnées d’un seul geste, sans même avoir besoin de les regarder. C’est l’argument que met en avant Euro NCAP pour encourager leur retour dans nos voitures.

 

Une incitation qui pourrait devenir une obligation

Dans les faits, Euro NCAP n’a pas le pouvoir d’imposer aux constructeurs d’abandonner les commandes tactiles ou même haptiques, y compris pour les fonctionnalités essentielles. L’organisme peut uniquement émettre des recommandations. Si les nouveaux modèles ne les respectent pas, ils pourront malgré tout être homologués, à condition de satisfaire aux autres critères de sécurité.

Malgré tout, Matthew Avery et Euro NCAP disposent d’une arme de taille : la notation aux crash tests. Tout laisse en effet à croire que les modèles ne respectant pas les recommandations ne pourront plus obtenir la note maximale de 5 étoiles, synonyme du meilleur niveau de sécurité. Or, cette notation constitue un argument de vente indéniable, tout particulièrement avec l’arrivée prochaine de la conduite autonome.

 

Un virage déjà pris par certains constructeurs

Avant même les déclarations de Matthew Avery, certains constructeurs avaient déjà décidé de revenir partiellement aux commandes physiques, notamment en raison des plaintes émises par les automobilistes. Une annonce que Volkswagen a d’ailleurs faite dès 2022 pour répondre aux attentes de ses clients. Les autres marques du groupe allemand ont, elles aussi, suivi le mouvement depuis, à l’image de Mercedes et BMW.

À l’inverse, certaines marques pourraient se montrer réticentes à faire marche arrière. C’est tout particulièrement le cas de Tesla qui, depuis plusieurs années, élimine progressivement tout bouton physique de ses habitacles. La version restylée de la Model 3, lancée en 2023, va même jusqu’à rendre tactile les clignotants et le sélecteur de vitesse : les premiers sont contrôlables sur la partie gauche du volant, tandis qu’il faut passer par l’écran tactile pour le second. Résultat ? La berline ne dispose plus d’aucun commodo derrière le volant.

Face à ce constat, une question évidente se pose : la perte éventuelle d’une étoile aux tests Euro NCAP pourrait-elle inciter le constructeur américain, mais aussi les autres marques, à abandonner le tout-tactile ? Réponse d’ici 2026.

 

Source : (1) European crash tester says carmakers must bring back physical controls – Ars Technica – 2024

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