Quelle relation entre la mode et l’automobile ?

La mode, nouveau terrain de jeu de l’automobile

Au cours de l’histoire, les chemins de l’automobile et de la mode n’ont cessé de se croiser, l’un empruntant à l’autre ses codes et inspirations. Au point de faire de la voiture un objet de haute couture à part entière et de progressivement effacer les quelques frontières qui subsistaient entre les deux univers.

Une histoire d’amour qui n’a rien de nouveau

Depuis presque toujours, l’automobile et la mode entretiennent un lien pour le moins étroit. Pour s’en persuader, il suffit de remonter jusqu’aux années folles, aux alentours de 1920. À cette époque déjà, le monde de l’auto emprunte les codes de la haute couture, en attestent les très élégantes Voisin Aérosport et Renault Nerva Grand Sport par exemple. Mais l’inverse est également vrai : déjà, les créateurs imaginent des vêtements spécialement conçus pour les conducteurs et conductrices, alors que d’autres vont réemployer plus tard les matériaux de l’automobile pour leur collection (comme l’alcantara par exemple).

L’exposition qui s’est tenue au Mondial de l’Automobile en 2014, retraçant l’histoire commune de la voiture et de la mode, est d’ailleurs la preuve que cette relation n’a fait que se renforcer au fil des ans. Tandis que la Mercedes-Benz 300 SL Papillon incarne l’exubérance d’après-guerre, la Citroën Méhari représente merveilleusement bien l’esprit des années pop, avant que la Peugeot 205 GTI ne soit l’illustration d’une période au cours de laquelle pub et performances étaient les maitres-mots. Durant toute cette période, on remarque d’ailleurs que les collaborations entre automobile, haute couture et photographie sont très nombreuses. Si bien que le jargon s’uniformise : on parle ici et là de lignes, d’élégance ou encore de galbe.

L’automobile accélère sa mutation

Malgré cette longue relation, ce n’est véritablement que depuis quelques années que la haute couture et la voiture ne font plus qu’un. Tout comme dans la mode, l’heure est à l’ultra personnalisation des véhicules : on choisit un modèle sur mesure comme on le ferait pour un sac ou une robe. Les constructeurs ont d’ailleurs bien compris que l’automobile détermine la personnalité et l’image de son propriétaire, tout comme son look en somme.

Les exemples récents sont légion. La nouvelle Renault Twingo La Parisienne, l’édition Inès de la Fressange de la DS 3, le lancement de la BMW i3 au musée des Arts décoratifs, la collaboration entre Opel et le collectif Andrea Crews, la Mercedes Classe G AMG redessinée par le directeur artistique de Louis Vuitton, la Smart Fortwo à laquelle le couturier américain Jeremy Scott donne des ailes, la Fiat 500 relookée par Gucci… les échanges s’intensifient et deviennent à présent une évidence.

Une volonté de rajeunir son public

Cette volonté de gommer les frontières entre l’auto et la mode ne doit toutefois rien au hasard. Alors que les jeunes sont moins nombreux à s’intéresser aux belles cylindrées, notamment en raison de leur vision d’un monde plus écologique que leurs aînés, les constructeurs ont compris qu’il fallait les séduire d’une nouvelle façon. Et quoi de mieux que la mode, terrain de jeu préférentiel des moins de 30 ans pour y parvenir ? Ils multiplient ainsi les collaborations, faisant appel à de grands noms de la haute couture, tout en investiguant les supports sur lesquels sont présents les automobilistes de demain : les réseaux sociaux.

Preuve de l’intérêt de la pratique, de nombreux constructeurs commencent même à créer des marques et événements dédiés à leur activité de mode. Avec Porsche Design par exemple, le groupe italien propose sa propre ligne de vêtements et d’accessoires pour une clientèle désireuse d’une image chic et sportive, et ce, même s’ils ne roulent pas en Porsche. Même constat pour Bentley et Mercedes, le premier proposant des articles de maroquinerie très haut de gamme, tandis que le second organise régulièrement sa Mercedes Benz Fashion Week.

Une image qui se veut plus féminine

D’abord prétextes pour commercialiser des véhicules, notamment au travers de publicités parfois misogynes, les femmes sont désormais omniprésentes au sein des nouvelles gammes. On tente de leur donner une nouvelle image de la voiture, de les séduire. Une fois encore, la mode devient un levier tout naturel pour attirer une clientèle qui, jusqu’à peu, ne constituait pas le cœur de cible des constructeurs.

Comme pour les jeunes, la voiture devient un objet d’image et, pour cela, les groupes piochent allégrement dans le monde de la haute couture : lignes plus arrondies, couleurs originales, personnalisation extrême, collaboration avec des grands couturiers, etc. Preuve de ce nouveau tournant, les équipes à l’interne commencent même à se féminiser. On peut notamment prendre comme exemple Antonella Bruno, passée de Ford à Jeep, Linda Jackson, directrice générale de Peugeot, ou encore Mary Barra, CEO de General Motors. De quoi penser que l’avenir de l’automobile pourrait bien passer par la mode et les femmes.

CE QU’IL FAUT RETENIR

Dès l’avant-guerre, l’automobile a commencé à s’inspirer de l’univers de la mode, tant pour sa communication que pour le design de ses modèles.
Depuis quelques années, les frontières se gomment et les constructeurs n’hésitent plus à créer leurs propres produits de mode.
La haute couture est désormais un levier pour toucher une clientèle plus jeune et féminine qui, initialement, n’a pas une forte appétence pour l’automobile.

LE POINT DE VUE DE LAURIE

« Alors que l’automobile entame une révolution comme elle n’en a plus connu depuis longtemps, avec l’émergence du tout-électrique, la mode pourrait se montrer encore plus utile dans les années à venir pour transformer l’image de tout un secteur. Reste à savoir si, pour favoriser ce changement, les constructeurs vont conserver une approche aspirationnelle ou préférer un argumentaire plus rationnel et technique. »